Vous pouvez me contacter sur fdebresson@manteslajolie.fr
Les points décrivent l'état d'esprit de l'échange
●●● chaleureux ●● neutre ● froid
21 DÉCEMBRE
C'est la 3ème
rencontre. Elle a toujours un bonnet comme sébile, cette fois ci bleu, et elle ne veut pas que je le photographie. Elle avait fait un dessin le 11 MARS 2014 (voir ci dessous). Cette fois ci je peux
montrer tout mon travail sur une tablette. On regarde la quarantaine de
planches. Elle a des réactions variées « c'est beaucoup de
rencontre », « est ce que ça a été publié dans un
journal ? », « c'est parfois amusant et d'autres fois
difficiles ». C'est la première fois qu'on reste aussi longtemps ensemble. Je crois comprendre que d'habitude elle se méfie des personnes comme moi, journaliste en général, qui transforme les rencontres. Je lui
laisse l'adresse du blog sur un carnet. Elle est vraiment intéressée par la
question du regard ●●●
Bettina, rue
Babylone
Elle assis sur un pas de porte, main tendue. Elle comprend tout de suite que j'ai fait l'école
des Beaux Art rue Malaquais car elle y était en 1981, atelier Poncelet. Elle se
souvient des différents cours qu'on pouvait suivre. Les étoiles sur son
panneaux sont un hommage aux différentes religions. Son fils l'a aidé à faire
son panneau. Au début elle interpellait les passants avec la voix. Maintenant
elle tient juste l'écriteau à la main car elle souhaite ne pas déranger. Elle dit
qu'elle arrêtera d'aller dans la rue en 2015. C'est la première fois que je vois un écriteau avec un dessin ●●●
Léonard, métro
La Chapelle
Il est assis au bas de l'escalier avec un écriteau. Il m'a fait un dessin
le 9 FÉVRIER 2014
(voir ci dessous). Cela le fait rire de le revoir après tout ce temps sur un
écran de tablette. On regarde les planches. Il réagit comme Adriana. Il doit
repartir en Roumanie au mois de janvier car il n'y a pas de travail ici. Il me
laisse ce dessin comme un autographe ●●●
Montrer les images sur un écran c’est vraiment intéressant. La relation est meilleure. L'image qui ressurgit
après un certain temps même quand elle toute simple, ça fait quelque chose.
C'est lié au fait que ça marque le temps passé et aussi qu'on voit l'image différemment
quand elle est projeté sur un écran. Je fais exactement le même constat dans
l'atelier des 4 matières que je dirige à, Mantes-la-Jolie. Comme avec un miroir ça fait réfléchir.
15 DÉCEMBRE
Une femme à Paris,
métro Strasbourg Saint Denis ●●●
J'ai été attiré par le bijou qu'elle agitait dans sa main gauche comme un chapelet et aussi par l'aspect chamarré de sa tenue. Après avoir proposé un carnet coloré qu'elle a reçu avec plaisir j'ai pris cette photo. Quand je lui ai montré le résultat elle m'a longuement serré la main.9
C'est la première fois que je photographie des mains qui sont la sébile, c'est plus émouvant, voila pourquoi l'image est floue.
1 DÉCEMBRE
NAGY MIKLOS
Paris, rue La Fayette ●●
Comme on ne parle pas la même langue, il m'écrit son nom sur une feuille (il y a un accents sur le O de son nom). L'échange est court, je laisse un carnet avec l'adresse du blog et des morceaux de crayons. Comme j'ai le dossier des "sébiles par thème" je peux lui montrer les images les plus comparables à la sienne. Cela l'amuse.
Je remarque le dessin des lettres et les petits points sur les i. Le carton forme un triptyque.
C'est la sébile d'un homme assis près d'une boulangerie. Il me dit un nom mais je n'arrive pas à le comprendre et je n'ai pas de quoi écrire. Par contre j'entends qu'il y ajoute le mot "de la planète".
C'est un objet d'enfance, couleur rose, avec une image plutôt heureuse.
23 NOVEMBRE
Paris, sur le pont Neuf ●●●
Il y a un couple assez âgés assis de part et d'autre du pont. C'est le mari qui utilise l'écriture.
Métal, couleur jaune, signes typographiques entre les lettres, petite cordelette au bas du carton, il y a beaucoup de signes distincts.
10 NOVEMBRE
RICHARD, Paris, ligne 2 ●●●
Le matin c'est moi qui griffonne sur un carnet assis dans le métro. Un homme passe en demandant une pièce : Veste, foulard autours du cou, très souriant il a quelque chose du titi parisien. Dans ses propos j'entends cette phrase qui surgit sur la tour Eiffel qui est la plus belle. L'après midi, de retour sur la même ligne, je le vois passer à nouveau. Je lui tend mon carnet, il lit la phrase et s'illumine comme d'une découverte. Il dit que c'est très vrai. Il parle du passé de Paris, des premiers métros verts et rouges, et de la tour Eiffel qu'il a vu grandir.
Il y a une émotion différente dans les rencontres en plusieurs étapes, nourries du temps passé entre.
24 OCTOBRE
Un Monsieur
A Tours ●●●
Assis près d'un distributeur il dit qu'il fait l’aumône. Je lui propose un crayon de couleur qu'il accepte avec joie. En échange je lui demande de pouvoir photographier son objet de métal.
C'est la première fois que je capture un objet sur une personne.
02 SEPTEMBRE
Un Monsieur agé
Dans la gare du RER Châtelet ●●
Le bois est poli et il y a une médaille associée à la sébile.
23 JUILLET
SAVIN
A Mantes-la-Jolie ●●
C'est un objet circulaire, en paille, avec une couleur, vide.
MARDI 3 JUILLET
THEO LOGAL (c'est le nom qu'il souhaite laisser).
A Mantes-la-Jolie.
C'est
un homme qui vient de Paris. Je l'ai remarqué quelques jours auparavant car avec sa tête hirsute et marquée, déplaçant des sacs avec lui, il détonne dans le milieu des quêteurs de cette ville. Aujourd'hui il est allongé au sol avec un air lointain mais souriant. Pourtant il engage tout de suite un monologue infini, cultivé et extrêmement chargé en personnes dates et évènements. Il me fait penser à un homme atteint d'autisme asperger, avec qui je travaille en atelier. Comme lui il a tant de chose en tête que les histoires s'échappent de partout. Il y est question beaucoup de croix mais aussi d'art, de Degas. C'est incroyable le contraste de ce corps et de ce langage. Devant la feuille il est comme tout le monde disant d'abord ne pas savoir dessiner. Longtemps il reste sans bouger quand soudain dans son récit il cite son père. Alors d'une main sure et rapide il trace ces lignes ●●●
LUNDI 16 JUIN
TOMA de la rue Monge.
C'est la couleur de sa sébile qui m'a fait venir le rencontrer. Comme il n'a pas de désir d'utiliser les crayons je lui demande la permission de la prendre en photo ●●●
ERIC
Avenue Denfert Rochereaux, Paris.
Je l'ai rencontré une première fois le 15 mai sur le pas de sa tente. Il était resté longtemps indécis
un crayon bleu à la main mais sans faire d'image. Ses yeux aussi sont bleu clair. Il est
daltonien. Il parle
beaucoup des couleurs. Celles de Gauguin qu'il trouve ternes, le noir
que trop de gens utilise pour l'habillement. Il aime surtout ce qui est
clair et lumineux comme l'aquarelle. Il y a un temps il avait une sorte
de site avec des images d'animaux mais il a arrêté à cause des
commentaires qui partaient dans tous les sens.
Aujourd'hui on parle de Limoge ou il a passé le permis poids lourd. Il me demande des nouvelles de ma quête. Je raconte la sébile rose de Toma que je viens de photographier à défaut d'un dessin. Du coup il me parle de la sienne, une porcelaine anglaise qu'il a depuis un an. Je ne l'avais pas vu au milieu du campement. Il me donne son accord pour la publier.
●●●
UN AUTRE JOUR
FREEZB, GREG, MAXIME et PEDRO
Dans le train de Mantes-la-Jolie à Paris.
Comme je rentre mon vélo dans le wagon, je refuse l'aide d'un jeune homme trop empressé. C'est un groupe de 4 personnes et ma réaction déclenche des tensions. Nous nous installons à distance. Alors que le train roule je vais les revoir avec des feuilles et des crayons. J'explique que pour m'aider ce qui est possible c'est de m'adresser quelque chose avec ce matériel. Arrivé à Saint Lazare je retrouve le groupe. Ils me donnent les images qui ont été réalisée pendant la demi heure de voyage.
Alors nous conversons avec grand plaisir sur les difficultés de Pedro, le centre d'art de Mantes que connaît Alexandre , la ville de Royan, le plaisir de l'image ●●●
MARDI 20 MAI
De la place de Clichy à Monceau.
Je fais trois rencontres sans images. La 1ère c'est une femme assise dans la rue qui quête à l'aide d'un objet entièrement recouvert de scotch. La discussion est âpre. Elle rejette toute idée de dessin ou de photographie parce que je ne donne pas d'argent.
La 2ème c'est un homme assis au milieu de la plus grande installation de sacs et d'objets que j'ai rencontré. Cela entoure la moitié de la statue de la place Clichy. Il y en a sur 12 pas de long et 2 pas de profondeur. Mais il est endormi sur sa chaise.
La 3ème c'est un homme assis sur un matelas sous un auvent protecteur. J'ai juste le temps de me présenter qu'il me lance un cinglant : "vous êtes artiste, hé bien faites le vous même le dessin" en me congédiant de la main
Je me dit que décidément il y a des jours moins heureux. Comme je poursuis la route surviennent ces deux rencontres :
ANGHEL CATALIN ENACHE
20 mai 2014, av. de Wagram, Paris.
C'est un jeune homme très cordial. Il vient de Roumanie mais on échange en espagnol, donc je peux bien expliquer le projet de publication des images sur le net. Il est très partant. Il propose ce dessin. A l'occasion si on se revoit il en proposera un autre.
Il y avait dans cette rencontre un vrai plaisir de communication ●●●
XAVIER
20 mai 2014, bvd de Courcelles, Paris.
Il est installé dans une cabine téléphonique. Il accepte rapidement la proposition. Comme une grosse averse se déclenche je me réfugie dans la cabine voisine de la sienne pendant qu'il dessine. Je découvre qu'elle est entièrement tapissée de dessin ! Il m'autorise à faire des photographies. Quand on se quitte j'écris l'adresse du blog sur un carnet que je lui laisse.
Il regarde longuement le nom du blog, quand il relève la tête il dit "c'est formidable de montrer ça, ça tue le silence" puis il ajoute "ça blinde contre le silence"●●●
Lors de la première chronique sur les sébiles le devenir des photographies restait une inconnue pour leurs propriétaires.
Cette fois ci les personnes sont informées de l'existence du blog, donc de la diffusion publique des dessins. Jusqu'ici c'est bien accueilli. Ce dernier témoignage indique que pour certain l'exposition des images à d'autres regards revêt une vrai signification.
15 MAI 2014
LOUIS DODIER
Tour Saint Jacques, Paris.
C'est un homme assis sur un banc qui regarde le boulevard. Il a un sac à dos à ses cotés, une casquette, des lunettes noires et une barbe. Il reste perplexe devant ma demande et commence par décliner. Comme j'insiste un peu il se lance dans ce dessin durant une dizaine de mn. Il me rend le carnet en me remerciant parce que "ça a été très agréable à faire".
Je remarque le graphisme dans les arbres, la forme du toit, la couleur de la maison et le croisement des chemins bleus ●●●
Je parle avec un homme assis rue Saint Jacques. Il ne souhaite pas faire quelque chose. Il me dit qu'"il n'a pas assez humain pour cela".
Je me dis qu'il a raison, qu'il faut une bonne dose d'humanité pour répondre aussi aimablement à une demande comme "S.V.P faites moi une image" formulé par un inconnu qui repart avec.
MARDI 6 MAI 2014
STÉPHANE LEBOUCHER
Place Victor Hugo, Paris.
Il est assis avec des pièces sur un bout de carton. Après m'avoir écouté, il demande : "c'est pour quoi faire?"
Comme je n'arrive pas à dire les choses simplement je montre le blog sur mon téléphone.
Aussitôt il est d'accord. En faisant le dessin il me demande si je travaille pour la Mairie de Paris.
Je dis non. Je lui laisse l'adresse du blog. Il demande combien de temps cela va mettre pour être publié. Je dis "moins d'une semaine". Comme on se quitte il dit "c'est super".
La lumière est représentée par trois fois dont une sous forme écrite ●●●
DJILALI
Place du Trocadéro à Paris
Il vend des images de Paris. Il est assis sur un banc avec des cartons à dessin à ses côtés, pour faire une pause. Il s'ensuit un quiproquo car il croit que je lui commande mon portrait.
2 fleurs, 2 "véhicules", 2 oiseaux et 1 personnage ●●●
MITICA
Avenue Mozart, Paris
Il joue de l'accordéon. Je tiens le carnet pendant qu'il dessine d'une main. Cela l'amuse énormément.
L'écriture est grande et enlevée ●●●
PETER
Avenue Mozart, Paris
Il a une canne pour unijambiste. On s'est déjà croisé, lui se souvient et moi je ne retrouve pas. Il dit un mot plusieurs fois. Comme je ne comprends pas il l'écrit.
Je me demande sa signification ●●●
LUNDI 29 AVRIL 2014
BEBERT
Rue Philippe Auguste, Paris.
Assis sur un banc, mâchant une viennoiserie,
il a, à ses côtés, un caddy rempli à ras.
Il ne voulait pas faire d’image mais écrire c’était possible.
Il s’est bien amusé, tellement qu’il a repassé les mots avec une autre couleur.
Il a hésité à mettre une signature caricaturale, et puis “non il ne faut
pas faire n’importe quoi”.
Il m’a dit après, surpris, en fait c’est un “dessin de lettre”.
J’ai dit “on dirait des mathématiques avec les signes + et - et les
barres”.
Il m’a dit “ah non alors, dites plutôt de
l’algèbre”.
Il n'est pas arrivé à écrire tous les mots à connotations négatives, comme "ennemi" sur lequel il a buté plusieurs fois ●●●
1 AVRIL 2014
VALI
Place Léon Blum, Paris.
Il est assis devant une supérette. Il a un très grand écriteau en carton qui évoque par écrit une liste de difficultés. A la première rencontre il me dit que ce n'est pas le moment, que c'est l'heure où il travaille le plus. Il propose que je revienne un matin. Je le revois une semaine après. Il dit qu'il ne va pas bien. Après avoir un peu hésité il prend un crayon noir. Puis il utilise des crayons de couleurs. Finalement il est très absorbé, et je l'entends chanter doucement. La séquence dure 20mn pendant laquelle des personnes continuent de donner de l'argent. A la fin il me tend l'image avec une évidente satisfaction et me demande un avis. Je dis qu'elle m'évoque le monde de la musique. Il est d'accord et me demande ce que je vais en faire. J'explique que je vais la diffuser.
Il y a parfois des musiques intérieures qui changent notre expression quand on s'y connecte ●●●
DIMITRI
Avenue de l'Opéra, Paris.
Plutôt taciturne, il est assis avec un écriteau en carton. On parle en anglais. Il était professeur d'histoire dans un autre pays. Il a aussi fait de la peinture à l'huile à une autre époque. Il dessine rapidement sans changer d'humeur, comme si c'était une forme déjà répétée.
Au delà du sujet il y a un axe de symétrie comme si le papier avait été plié au milieu. A cet endroit il y a des coutures ●●
ALIN
Boulevard des Capucines, Paris.
Assis avec juste un gobelet, il est trop gêné pour refuser mais vraiment il dit ne pas savoir dessiner. De celui ci il dit juste qu'il a fait comme on apprend à l'école.
Souvent dans mes ateliers à Mantes-la-Jolie les personnes disent ne pas pouvoir dessiner parce qu'elles pensent qu'il faut d'abord être enseigné pour le faire ●●
CHRISTIAN'
Place de la Madeleine, Paris.
Assis avec une tenue de treillis il parle anglais. C'est très sympathiquement qu'il décline absolument de faire quoi que ce soit comme dessin ou écriture. Je photographie le bleu de sa sébile, il s'exclame avec un grand sourire "yes that's it !"
Il y a toujours une image,toujours ●●●
CALIN PETRE
Rue de Presbourg, Paris.
Il est assis sur une valise, familier des lieux. Devant lui il a un bonnet et un petit écriteau. On parle italien. Il hésite longtemps avant d'accepter. Il n'est pas satisfait du résultat. Il ajoute son nom en m'expliquant que cela lui rappelle les dessins qu'il faisait enfant. Comme on se quitte il me demande de revenir le voir car une autre image lui vient.
Les formes fractales des branches, les dents du soleil, l'espace de la feuille occupé jusque sur les bords, tout cela signe ●●●
26 MARS 2014
INEZ de BRESSON da ROCHA
Paris, image adressée.
18 MARS 2014
MIHAI
Avenue Mozart, Paris.
C'est un monsieur assis avec juste un gobelet. Il me fait comprendre plusieurs fois que cela n'a pas de sens car il ne sait pas du tout dessiner. Il fait quand même ce personnage et me le tend en levant les yeux au ciel. Comme j'essaye de retenir son nom il reprend le papier pour l'écrire. D'un coup il se met debout et devient très chaleureux.
Je tiens cette phrase d'Amin Maalouf : "L'écriture est un univers situé au carrefour de l'image et du son". Ce nom dessiné devient entendu, voila la différence ●●●
11 MARS 2014
HEIKO
Avenue de Chateaudun, Paris
Il est assis contre un immeuble avec une sébile très rouge qui m'a attiré. Il reste pensif un moment devant les crayons, sans rien dire. Je ne sais pas ce que signifie ce temps de réflexion. Je reste assis à ses côtés. Puis il fait cette image, toujours sans parler. Comme il me rend le matériel il dit :
"C'est le jour où mon chien Branku est mort. Ça s'est passé dans un parc, en Allemagne, par une belle après midi"
C'est la première fois que je suis confronté à une telle gravité du sujet croisé avec la douceur de la forme ●●
DIANA
Avenue de Chateaudun, Paris.
J'avais croisé cette femme, adossée à un mur avec un simple bonnet sur le sol, une année auparavant. Elle avait alors gentiment et fermement refusé que je prenne sa sébile en photo. Cette fois ci elle accepte de justesse la proposition de dessiner. Elle est très critique de ce qu'elle me rend. En fait ce qui l'a pris au dépourvu c'est qu'elle se souvient très bien de ma demande précédente. D'habitude elle oublie tous les visages qu'elle voit dans la rue.
La forme de sa fleur me fait penser à un objectif d'appareil photo, j'aimerais voir ce qu'elle ferait comme photographe ●●
3 MARS 2014
CHRISTIAN
Tour Saint Jacques, Paris.
C'est un jeune homme que j'ai rencontré plusieurs fois lors des chroniques de la sébile. Il a toujours des livres qu'il utilise comme réceptacles à pièce. Il accède donc à ma demande facilement et prend du temps pour dessiner.
Il y a cette écriture à moitié tracée ●●●
|
28 FÉVRIER 2014
|
BASIL
Boulevard de Sébastopol, Paris.
Un jeune homme rencontré pour la première fois. Je commence par sa sébile.
Cette fluorescence de la couleur me suffit ●●
9 FÉVRIER 2014
LEONARDO
Métro La Chapelle.
Comme il est de face au bas d'un escalier on le voit qui nous regarde quand on descend. Il est assis, une capuche relevée sur la tête et une grande barbe, de loin tout cela fait sombre.
Il a un carton pour demander de l'argent. On parle en espagnol. Il est très hésitant sur le fait de dessiner et préfère utiliser le crayon pour écrire. Il me dira aussi que son vrai travail c'est camionneur. Je l'ai revu en mai, il m'a dit qu'il partait travailler en Allemagne et qu'on se voyait pour la dernière fois.
Le sourire sur le visage c'est ce qu'on voit quand on est très près de lui ●●●
9 JANVIER 2014
JACQUES
Métro Saint Lazare, Paris.
Il est plus que loquace. Il a composé un panneau avec des mots collés "BONNE JOURNÉE" sur fond bleu, "La chance se présentera à vous" sur fond blanc et "MERCI" sur fond rouge. Il y a également une photo tirée d'une publicité pour les tickets restaurants. Le tout est encadré par un scotch argent. Dessus il y a un bol noir pour mettre les pièces et à côté sa carte d'invalidité. Il parle surtout pour évoquer ses difficultés, ses maladies. Il dit qu'il préfère être là que seul dans sa chambre.
Cette figure dessinée représente deux figures qui s'embrassent donc qui se taisent ●●●
ALEXANDRU,
7 décembre 2013, Mantes-la-Jolie.
C'est la première fois que quelqu'un reste plus d'un quart d'heure sur l'image. Il a un plaisir manifeste de caresser le papier très doucement avec le crayon. C'est avec un grand sourire qu'il me rend cette image ●●●
LIVIO,
17 décembre 2013,
rue Ordener, Paris.
Bien assis dans la rue, il accepte ma proposition. L’attitude
était très appliquée, tranquille. Au bout de 10 mn il me tend le résultat sans faire de commentaire
Voila une image au carrefour de l'abstrait et du figuratif ●●
ANGEL
19 décembre 2013, métro La Chapelle, Paris
C'est un homme sans bras qui parle une autre langue. Il y a deux ans il s'était opposé absolument à ce que je fasse cette photo en mettant sa jambe en travers. Peut-être mon approche a évolué, maintenant il est d'accord.
Quand les crayons sont inutiles, les yeux prennent le relai ●●●
ALEX
12 décembre 2003, rue Parmentier, Paris.
Assis au pied d'un arbre, il est contrarié parce que je n'ai pas d'argent à donner. Il réalise cette forme en une seconde.
C'est étonnant le pouvoir de cette ligne sur mon imaginaire ●
MARIAN,
11 décembre 2013, rue
de Rivoli, Paris.
C’est un
homme qui fait la manche assis avec, comme sébile, un pot tout rond de
fabrication artisanale. Il s’amuse en dessinant et demande mon avis
à la fin.
L’absence de maitrise de
la perspective produit une autre forme : La maison est
comme enveloppée, la marche d’entrée aussi ●●●
GINA
10 décembre 2013, rue Théophile Gautier, Paris
Elle est assise dans la rue. La sébile fait penser au fleuriste à côté duquel elle se situe
C'est un autographe ●
EXPERST
19 décembre 2013, station gare d’Austerlitz, Paris.
Elle est
entièrement dissimulée par la couverture. Comme on ne voit pas son visage je fais une photo de cette silhouette et je lui montre.
Elle dit, étonnée : “c’est moi
ça?”.
Sur la
feuille que je lui passe elle dessine rapidement de la main gauche, sans hésitation, cette forme bleue.
Tout en crayonnant elle dit que
les artistes sont toujours fauchés et me demande pourquoi.
Je publie sa photo et son dessin à cause de l'étrange effet miroir ●●
Un homme,
4 décembre 2013, rue de Maubeuge, Paris
C'est un
homme installé avec des objets fabriqués en morceaux de canettes.
Il acquiesce
à ma demande de dessiner quelque chose sans rien dire ni demander.
C'est la première fois que j'aborde seul une personne en demandant d'emblée de faire une image. Je suis si
étonné de cette acceptation spontanée que j'en oublie de lui demander un nom ●●
TI BOB,
Dimanche 1er décembre 2013, métro ligne 12, Paris.
Ce matin tôt
nous sommes peu dans le wagon. Il y a un homme très grand qui boxe
les portes et les sièges.
Il crie aussi
des menaces avec un
regard inquiétant. Finalement il stoppe devant moi qui suis assis.
Avant qu’il ne
me parle, je sors de ma poche deux crayons et lui tend, un jaune et
un bleu.
Il se
stupéfie sur place, les prend et je vois qu’il réfléchit.
Je vois aussi
que dans sa main les crayons, taillés du matin, sont assez pointus.
Finalement il
me dit “qu’est ce que vous voulez que j’en fasse?”.
“C’est
pour dessiner”.
Il répond “
dessiner quoi?” et il enchaîne “ah oui le soleil et la lune”.
Je lui passe
une feuille. Il s’assoit direct à mes côtés et dessine sans rien
dire durant 4 stations.
Il me rend
tout le matériel en guettant mon avis. Il le montre également à
une femme montée entre temps qui lui sourit en retour.
On parle de
tout cela, la colère comme source de création et l’image comme
véhicule de communication, mon travail de direction du centre municipal de la création visuelle pour la ville de Mantes-la-Jolie.
Je conserve
son dessin et lui laisse une autre feuille pour la suite du voyage.
Cette fois ci
c'est une silhouette humaine, et il ajoute des cheveux féminin :
“haha c’est E.T. !”
Il s’excuse
pour son entrée en matière “c’est à cause d’une nuit à
boire sans dormir”.
Le métro
arrive à ma destination.
Je me lève
pour partir, il demande si je peux l’embaucher dans mon centre, je
dis : “non”.
Il rigole et
dit qu’il va dessiner mon portrait.
On est à la
station Concorde
Voila un autre usage : Quand faire de l'image participe de cet adoucissement de la vie ●●●
DELIA PERRINI
13 novembre 2013, Mantes-la-Jolie
J'ai
rencontré Délia lors d'une soirée théâtre sur le thème de l'exclusion ou les
photographies des sébiles étaient exposées. Elle m'a raconté avoir
connu la vie dans la rue. Plus tard elle m'a adressé cette image par
mail ●●●
NICHOLASSS
14 octobre 2013, angle bvd Magenta rue Saint Vincent de Paul (coté
gare), Paris.
Il est assis à l’angle des deux rues à même le sol. Il dit son nom en insistant sur les s.
Il vient de l’est mais
on décide de parler en espagnol.
Il a une sébile pour demander de l'argent, un simple gobelet de plastique.
De tout près je remarque qu’elle est posée au centre
d’un cercle gravé sur le sol.
Comme je l’interroge il m’indique alors une épingle à
cheveux posée sur le petit muret du magasin où il s’adosse.
Pour accompagner le temps il l’utilise et grave des
cercles à même le trottoir, cela fait un son comme un tourne disque.
Quand faire de l'image permet de résister à l'écrasement du temps ●●●
DENIS,
Avril 2011 et 2013, kiosque à journaux de Ménilmontant, Paris.
Il y a 3 ans avec deux artistes nous avions collecté une première série d'images auprès de commerçants vers Ménilmontant. Ce dessin nous avait tellement frappé par sa qualité plastique qu'on l'avait rendu à son auteur. Trois ans plus tard j'ai revu Denis, toujours en poste au même endroit. Nous avons échangé longuement. C'est un métier où le corps est environné d'images et d'écritures. Particulièrement sur son kiosque il y a des cartes, des messages, des photographies, toutes déposées par des clients et posées en strate tout autour de la "guérite". La création est très présente : la musique, la guitare, l'écriture japonaise, la Grèce, les collages de photographies, les cahiers de foot et puis un nouveau petit dessin qui représente une maison visage dont la fumée s'échappe amplement par la cheminée.
Plus tard j'ai pensé à un poète dans la ville ●●●